DISCOURS DE FREDERICK DOUGLAS SUR HAITI, CONSIDÉRÉ COMME PROPHÉTIQUE

Haïti a le même droit de refuser que nous avons de demander et il n’y avait d’insulte ni dans la demande ni dans le refus. [Applaudissements.]
Ni l’importance commerciale d’Haïti, ni son importance géographique ou numérique ne doivent être sous-estimées. [Applaudissements.] Si elle désire beaucoup du monde, le monde désire beaucoup de ce qu’elle possède.[Applaudissements.]

Elle produit du café, du coton, du bois de campêche, du bois d’ébène et du gaïac. Le revenu que le gouvernement réalise
de ces produits est entre neuf et dix millions de dollars. Avec un tel revenu, si Haïti pouvait être délivrée des révolutions, elle pourrait facilement devenir, en proportion à son territoire et à sa population, le pays le plus
riche du monde. [Applaudissements.]

Et pourtant, elle est comparativement pauvre, parce qu’elle est révolutionnaire.
La population d’Haïti est estimée à près d’un million. Je pense que le nombre actuel dépasse cette estimation.                                                       Dans les villes et les cités du pays, les gens sont en grande partie de sang mixe et leur couleur va du noir au
blanc. Mais les habitants de l’intérieur sont de sang noir pur.

La couleur dominante parmi eux est brun foncé avec un soupçon de chocolat.
A plusieurs égards, ils sont assez beaux. Il y a en eux une sorte de majesté.
Ils se tiennent debout avec fierté comme s’ils étaient conscients de leur liberté et de leur indépendance. [Applaudissements.]

J’ai trouvé les femmes bien supérieures aux hommes. Elles sont élastiques, vigoureuses et belles.                                                                         Elles se déplacent avec la cadence d’un cheval de race. La production, la richesse et la prospérité du pays dépendent largement d’elles.
[Applaudissements.]

Elles fournissent des provisions aux villes et cités, les transportant sur des distances de quinze à vingt mille 2 et souvent elles portent un bébé comme charge additionnelle. Curieusement, ce bébé est attaché au côté de la mère. Elles ont l’air de ne faire aucun cas de leur fardeau, de la longueur du voyage ou de ce poids supplémentaire.

Des milliers de ces femmes de campagne en robes bleues simples et foulards multicolores, marchent en file le long des routes conduisant à Port au Prince. Le spectacle est certainement frappant et pittoresque. Une bonne partie des produits du marché est aussi amenée des montagnes sur des ânes, mules, petits chevaux et bétail. Dans le traitement de ces animaux,
nous voyons en Haïti une cruauté héritée de l’ancien système esclavagiste. Elles les battent sans merci.

J’ai dit que les hommes ne m’ont pas frappé comme étant les égaux des femmes. Je pense que cela est dû largement au fait que la plupart d’entre eux sont contraints de passer une bonne partie de leur vie comme soldats au service de leur pays et c’est une vie souvent néfaste à la croissance de toutes qualités viriles.

Un homme sur trois que vous rencontrez dans les rues de Port-au-Prince est un soldat. Sa vocation est contre nature. Il est séparé de son foyer et du travail. Il est tenté de passer une bonne partie de son temps à jouer, boire et à s’adonner à d’autres vices destructeurs; des vices qui ne manquent jamais de se manifester de façon répulsive dans les manières et le comportement de ceux qui s’y adonnent.

Quand j’ai marché à travers les rues de Port-au-Prince et ai vu ces hommes ternis, délabrés et mous, je me suis surpris à reprendre sur Haïti la lamentation de Jésus sur Jérusalem, me disant, « Haïti ! Pauvre Haïti! Quand apprendra-t-elle et pratiquera-t-elle ce qui lui apportera la paix et le bonheur ? »

Aucune autre terre n’a de cieux plus lumineux. Aucune autre terre n’a d’eau plus pure, de sol plus riche ou de climat plus heureusement diversifié. Elle a toutes les conditions naturelles essentielles pour devenir un pays noble, prospère et heureux. [Applaudissements.]           Pourtant, la voici, déchirée et brisée par les révolutions de factions bruyantes et par des anarchies; pataugeant d’année en année dans un labyrinthe de misère sociale.

De temps en temps, nous la trouvons convulsée par une guerre civile, engagée dans le terrible travail de la mort; répandant avec frénésie son propre sang et conduisant ses meilleurs cerveaux à un exil sans espoir. Port-au-Prince, une ville de soixante mille âmes, capable d’être transformée en l’une des plus saines, des plus heureuses et l’une des plus belles villes des Antilles a été détruite par le feu une fois chaque vingt-cinq ans de son histoire. L’explication est celle-ci : Haïti est un pays de révolutions. Elles éclatent sans avertissement et sans excuse. La ville peut être là au coucher du soleil et disparaître au matin. Des ruines splendides, autrefois les maisons de riches, se voient dans chaque rue.

1 commentaire

  1. Il n’y a rien de nouveau sous le soleil et surtout dans la cendre de nos désespoirs de peuple noir au comportement favorable à la pérennisation de sa misère noire

    Nous avons semé la pagaille pour récolter cette racaille de taille dans notre existence remplie de failles

    Les dieux nous sont tombés sur la tête à partir du moment où ils avaient consentis de nous donner accès à l’apprentissage des chiffres et des lettres à la lettre

    Quand on se comporte comme des bêtes, des êtres incapables de maîtriser leurs instincts de bases, on doit trouver d’abord un moyen de les dresser avant d’envisager de les former.

    Car il faut avant tout apprendre à être dans son être pour son bien-être avec les êtres qui nous ont vu naître comme un espoir pour la communauté initiée par nos ancêtres

    Hors de cette prise de conscience de son appartenance à ses croyances ancestrales au maximale, on risque de se voir desaxer et dériver loin de la route menant à sa vraie destinée

    Après avoir été par nécessité l’auteur de cette grande épopée marquant notre existence de peuple libre, on aurait dû trouver les moyens de continuer à exister et à vivre ensemble avec la même détermination qui nous a value notre libération

    Le discours de ce monsieur est d’ailleurs inscrit dans cet ordre d’idées. Le plan à la base c’était de s’approprier d’une partie de notre terre de force ou à la légère.

    Mais ils avaient peur que la même histoire ne se répète dans leur cas aussi

    Ils ont ainsi pris leur temps, employant leur talent de nous pousser à une mort lente avant de pouvoir nous ravir de tout ce qu’ils jugent bon

    Entre temps, comme des enfants, nous continuons notre pérégrination malgré l’augmentation de notre formation

    Jusqu’où auront-ils dans leur projets macabres contre nous?

    Quand est que nous reprendrons la main pour récupérer la situation ?

    Merci mon ami pour ce partage!

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